Principales maladies du blé au Maroc
Pr. Ezzahiri Brahim
Département de Productions, Protection et Biotechnologies Végétales
Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II Rabat, Maroc
Le blé peut être attaqué par de nombreux agents pathogènes à différents stades de son développement, du semis jusqu’à la récolte. Malgré que le blé puisse être attaqué par une panoplie d’agents pathogènes, les observations faites sur le terrain ces dernières années au Maroc ont montré qu’il existe deux principaux groupes de maladies qui peuvent affecter sérieusement le rendement du blé, localement et à grande échelle.
Le premier groupe est composé de trois maladies foliaires, la septoriose et les rouilles jaune et brune. Ces maladies sont favorisées par les conditions pluvieuses et humides. Leur développement peut être explosif dès le stade épiaison du blé. La lutte contre ces maladies foliaires repose sur la combinaison de méthodes culturales (rotation, labour d’été), génétiques (résistance et tolérance variétale) et traitements chimiques foliaires.
Le deuxième groupe est composé de pourritures racinaires, du piétin échaudage et de la fusariose de l’épi. Les maladies de ce groupe sont favorisées par la combinaison de conditions hydriques et édaphiques spécifiques et peuvent occasionner localement des pertes spectaculaires et irréversibles. La gestion des maladies de ce groupe repose essentiellement sur l’utilisation de méthodes culturales préventives.
Maladies foliaires
Les septorioses
Deux espèces de septorioses attaquent le blé : Septoria tritici responsable de la septoriose des feuilles et Stagonospora nodorum responsable de la septoriose des glumes.
Les deux espèces de septorioses sont présentes au Maroc avec une quasi-dominance de Septoria tritici. Les septorioses sont importantes en années pluvieuses et humides. Elles sont fréquentes dans les régions de Doukkala, Chaouia, Sais, Gharb et Zaïre. Elles peuvent s’étendre à d’autres régions céréalières en années exceptionnellement pluvieuses.
Vu son importance, nous allons traiter exclusivement la septoriose des feuilles. Celle-ci apparait sous forme de lésions nécrotiques foliaires (Figure 1) réduisant ainsi les surfaces photosynthétiques vertes. Ce qui impacte négativement la croissance de la plante et donc le rendement final. Les pertes de rendement peuvent aller jusqu’à 30% en cas d’attaque sévère du blé.
La principale source de contamination primaire de la septoriose des feuilles est constituée par les chaumes du blé à la surface du sol. En présence de chaumes contaminés par les pycnides de Septoria tritici, les premières infections apparaissent sur les plantules du blé.
L’humidité de saturation est indispensable pour tous les stades d’infection. On considère qu’après la pluie, une contamination réussie nécessite une période d’humidité relative de saturation de 15 à 20 heures, avec une température supérieure à 10°C. Ce qui fait que des précipitations fréquentes et des températures modérées (5-20°C) sont propices au développement de la septoriose des feuilles.
L’éclaboussure des gouttes de pluie au contact des feuilles portant les pycnides du champignon, provoque la contamination des étages supérieurs de la plante. La maladie monte ainsi progressivement du bas vers le haut de la plante. La maladie peut être observée en décembre sur du blé semé précocément, mais elle est plus fréquente à partir du mois de mars du stade redressement à début montaison.
La rouille jaune
La rouille jaune est devenue à côté de la septoriose, la principale maladie du blé depuis 2010 au Maroc. Les attaques sont observées presque exclusivement sur les variétés de blé tendre. Le pays a connu des épidémies plus ou moins extensives de cette maladie presque annuellement durant les six dernières années. Ce changement drastique est lié à l’extension des superficies emblavées en blé tendre qui sont passées de 800.000 hectares en 1985 à plus de 2 millions d’hectares aujourd’hui, à l’utilisation de variétés productives de cette espèce mais très sensibles à la rouille jaune et à l’apparition d’une nouvelle race virulente de Puccinia striiformis. Cette race appelée Warrior, plus agressive, est responsable de développements épidémiques répétés de la maladie dans les pays situés dans la même zone épidémiologique que le Maroc. Il s’agit notamment des pays de l’Europe occidentale, où la maladie a été particulièrement sévère en 2014.
L’agent responsable de la rouille jaune est un parasite obligatoire, qui a besoin d’un hôte vivant pour sa survie. Ce qui fait, qu’en absence de l’hôte principal, le champignon continue son développement en été sur des repousses de blé «Green bridge » dans des zones fraiches en altitude. De même, cet agent pathogène a la capacité de se disséminer par le vent sur de longues distances. Ceci peut favoriser un échange d’inoculum entre certains pays de l’Europe occidentale et le Maroc pendant la saison pluvieuse.
La rouille jaune se manifeste sous forme de pustules jaunâtres, alignées le long des nervures des feuilles, sous forme de stries. Le développement de l’infection est de type systémique. Ce qui fait qu’une spore infectieuse peut générer une multitude de pustules le long des nervures. Cette propriété singulière fait que cette maladie est de caractère explosif. De même, les premières infections par le champignon apparaissent d’abord sous forme de foyers localisés (Fig. 2) avant la généralisation de la maladie dans un champ donné. Le blé est sensible à la maladie du stade plantule au stade adulte. Les pertes peuvent aller jusqu’à 70% si l’attaque est généralisée dès le stade gonflement.
La rouille brune
La rouille brune est une maladie endémique au Maroc, qui apparait annuellement à des degrés variables en fonction des conditions climatiques. Le cycle de vie de l’agent pathogène responsable de la rouille brune est complexe et implique un hôte principal et un hôte alternatif. Au Maroc, la rouille brune a comme hôte alternatif fonctionnel Anchusa italica. L’agent pathogène Puccinia triticina se conserve sous forme de téleutospores sur les chaumes du blé. Ces téleutospores en présence de la pluie vont germer et infecter les plantes de l’hôte alternatif se trouvant à proximité des chaumes. A leur tour, les spores produites sur l’hôte alternatif vont infecter les plantules de blé. Ce qui fait que les premières infections du blé, par la rouille apparaissent précocément au stade tallage dans certains endroits. Ce qui donne lieu plus tard à la formation de foyers d’infection dont la caractéristique est la présence de pustules de rouille sur les feuilles de base des plantes. Par la suite, le vent assure la dissémination des spores de l’agent pathogène dans des zones plus vastes, provoquant ainsi des infections généralisées du blé à partir de l’épiaison (Figure 3). La maladie peut se développer aussi bien sur des variétés sensibles de blé tendre que de blé dur.
Gestion des maladies foliaires
Une protection réussie de la culture du blé contre les maladies foliaires se base sur l’utilisation combinée de moyens préventifs et curatifs. Cette combinaison est composée de l’utilisation de semences saines, de l’adoption d’un assolement adéquat, du choix de variétés résistantes et de l’utilisation raisonnée de fongicides.
Les pratiques culturales comme l’assolement et la gestion des résidus sont importantes pour le contrôle de la septoriose. Celle-ci est causée par un champignon dont la survie est dépendante des résidus du blé à la surface du sol. Ce qui fait que les champs de blé les plus disposés à l’attaque de cette maladie sont ceux dont le précédent était un blé. De même, le champignon responsable de la septoriose a besoin du temps pour d’abord s’installer dans un blé au stade jeune avant de se propager vers les étages supérieurs après la montaison, et ce en présence de la pluie. Les semis précoces sont plus vulnérables aux attaques de la septoriose que les semis tardifs. Les plantules issues des semis précoces sont exposées à l’infection par la septoriose parce que les températures sont encore douces, et ce en présence de la pluie.
La résistance variétale, quand elle existe, reste la méthode de lutte la plus économique et la plus pratique contre les maladies foliaires du blé. Certaines variétés de blé dur et tendre inscrites au catalogue sont résistantes à une ou plusieurs de ces maladies foliaires. La prise en considération de la résistance variétale dans la gestion des maladies foliaires va permettre de faire des économies sur les dépenses en matière de lutte chimique. Seulement dans beaucoup de situations, les variétés de blé sont sensibles à une ou plusieurs maladies foliaires principales. Ce qui fait que le recours à la lutte chimique devient indispensable.
Raisonnement de la lutte chimique
Détermination des risques d’infection
Septoriose
Les premières lésions de septoriose sont observées sur les feuilles basales et sont détectables à partir du stade tallage. La progression de la maladie se fait de bas en haut. Elle est lente avant épiaison mais rapide après.
Suite à la détection des symptômes de ces maladies sur les feuilles inférieures du blé, la décision du traitement fongicide est prise lorsque les conditions de dissémination de ces maladies sont présentes. Les précipitations constituent le facteur de dissémination principal de la maladie. Quand la pression de la maladie est élevée, l’intervention avec des fongicides est bien justifiée pendant la montaison (lorsque 2 nœuds sont apparents sur la tige du blé).
Rouille jaune
Le risque de la rouille jaune est évalué par la localisation des premiers foyers de cette maladie dans le champ de blé. Si ces premiers signes de la maladie sont présents dans une parcelle, toutes les variétés sensibles avoisinantes sont menacées par cette maladie très contaminatrice. Il est conseillé alors de traiter les variétés sensibles de blé tendre à l’aide de fongicides. Le développement de la rouille jaune est favorisé par un temps à ciel couvert, une humidité élevée et des températures fraiches.
Rouille brune
L’appréciation du risque de la rouille brune se base sur la détection des premières pustules de la maladie sur les 2 dernières feuilles. Des périodes humides (pluie, rosée, brouillard) et des températures modérées favorisent le développement de la rouille brune entre mi-février et fin avril en fonction des régions.
Stades critiques d’infection du blé
La septoriose et les rouilles brune et jaune se propagent rapidement dès le stade épiaison du blé. De ce fait, ces maladies affectent essentiellement le remplissage des grains et par conséquent la stratégie de lutte chimique contre ces maladies doit cibler la protection des deux dernières feuilles du blé. Quand la pression de la maladie est élevée dans une zone, un deuxième passage serait nécessaire 3 à 4 semaines après le premier traitement fongicide.
Choix des fongicides
Les spécialités disponibles sur le marché sont efficaces à des degrés variables vis-à-vis de la septoriose et des rouilles jaune et brune. Les fongicides homologués sur blé contre ces maladies au Maroc (Index phytosanitaire, AMPP et site de l’ONSSA) appartiennent à deux familles chimiques principales: les triazoles et les strobilurines. En absence de stratégies d’utilisation de ces fongicides, les risques de développement de la résistance à ces substances sont très élevés. L’expérience a montré qu’en très peu de temps, les strobilurines, utilisées à très large échelle en Europe, ont perdu l’essentiel de leur efficacité. De même, de nombreuses substances actives de la famille des triazoles ont perdu progressivement de leur efficacité au fil des années. Ces phénomènes de résistance concernent surtout la septoriose.
Au Maroc et en absence de données sur l’état de résistance aux fongicides de différentes espèces de champignons responsables de maladies foliaires du blé, il serait judicieux d’adopter une stratégie permettant de prolonger la durée de vie des substances fongicides actuellement disponibles sur le marché. Cette stratégie doit se baser sur l’alternance des fongicides à modes d’action différents et l’utilisation des mélanges de matières actives appartenant à différentes familles chimiques.
Figure 1. Développement graduel du bas vers le haut de la septoriose sur blé
Figure 2. Foyer de rouille jaune sur blé
Figure 3. Attaque sévère de rouille brune sur blé dur
Maladies des racines et de l’épi
Un système racinaire sain et vigoureux est nécessaire pour assurer l’absorption de l’eau et des éléments nutritifs indispensables à la croissance et au développement des plantes. Ces fonctions sont perturbées lorsque les racines sont attaquées par des agents pathogènes. Les maladies du pied et des racines causées par des champignons au Maroc chez le blé sont les pourritures communes ou sèches et le piétin échaudage. Les pourritures racinaires communes se développent dans les zones à faible pluviométrie (arides et semi-arides). Par contre, le piétin échaudage est observé dans les zones humides.
Quant aux maladies de l’épi, la fusariose peut causer des dégâts importants en années pluvieuses, avec un début de printemps humide. Les autres maladies de l’épi, la carie et le charbon nu ne sont observés qu’occasionnellement au Maroc, grâce à la grande utilisation de semences certifiées et traitées.
Les pourritures racinaires communes
La maladie des pourritures racinaires se manifeste aussi bien sur blé tendre que sur blé dur. Des pertes localisées peuvent être occasionnées par la diminution du tallage, par la réduction de la taille des épis et par la perte des plantes. Cette maladie apparait plus particulièrement dans les zones à faible pluviométrie (arides ou semi arides). Les champignons responsables de cette maladie sont Cochliobolus sativus, Fusarium culmorum et F. graminearum.
Les plantes atteintes montrent des épis blancs non remplis. Pour s’assurer de la nature exacte de la maladie, on arrache quelques plantes atteintes et on examine le système racinaire. Des lésions brunes sont observées sur le collet, sous le collet et les racines.
Les champignons responsables des pourritures racinaires survivent sous forme de spores dans le sol et sur les résidus des plantes hôtes, à une profondeur de 10 à 15cm. L’infection du sous collet et des racines émergeant du collet est due à la présence de l’inoculum à une profondeur superficielle du sol.
Les agents pathogènes responsables des pourritures racinaires sont considérés comme des agents de faiblesse. Ils s’attaquent aux plantes quand celles-ci sont affectées par des stress environnementaux importants. La gravité des pourritures est favorisée par la sécheresse, le semis profond, le manque de tallage.
Lutte contre les pourritures racinaires
La rotation et la jachère restent les méthodes les plus appropriées pour la prévention des pourritures racinaires du blé. Des rotations avec des dicotylédones, comme les légumineuses réduisent le risque de développement des pourritures racinaires.
Le traitement des semences avec des fongicides à large spectre d’action, protège les racines du blé des attaques des champignons responsables de la pourriture racinaire.
D’autres pratiques sont aussi utiles dans la protection du blé contre les agents des pourritures racinaires, comme le non-labour et le semis superficiel. De même une fertilisation azotée et potassique correcte a un effet indirect sur les pourritures racinaires en améliorant la vigueur des plantes du blé, et par conséquent, leur résistance à l’infection par les agents responsables de ces maladies. Certains auteurs ont rapporté aussi, que la forme ammoniacale de l’azote est plus efficace que la forme nitrate dans la réduction de l’activité des agents des pourritures racinaires.
Piétin échaudage
Le piétin échaudage est causé par un champignon du sol, Gaemannomyces gramins var. tritici qui dans un premier temps attaque les racines. Il peut s’attaquer au blé à tout moment durant la saison. Les pertes de rendement peuvent atteindre 50% dans les cas les plus graves. Les plantes sévèrement infectées sont naines, développent peu de talles et peuvent mourir prématurément. Comme autres conséquences du piétin échaudage, on peut citer les grains chétifs (maturité précoce) et des épis vides.
Un des symptômes caractéristiques du piétin échaudage est le noircissement des racines qui peut avoir lieu dès le stade plantule. A l’épiaison, les plantes atteintes sont de couleur blanche (paille sèche), et les épis sont blancs et desséchés. C’est un symptôme caractéristique de l’échaudage. Les symptômes apparaissent sous forme de petits foyers ou de grandes zones irrégulières. Les plantes atteintes peuvent être facilement retirées du sol. Ces symptômes apparaissent pendant le remplissage. On assiste à un échaudage complet de toute la plante avec ses talles. Quand on examine les racines des plantes malades, on observe des nécroses noires parfois étendues à toute la racine. Le bas de la tige présente un manchon noir de 1 à 3 cm qui peut remonter au-dessus du plateau de tallage (Figure 4).
Les symptômes apparents du piétin échaudage peuvent être confondus avec d’autres anomalies (fusariose de l’épi et cèphe). Pour le piétin échaudage, tous les épis du pied sont échaudés. La fusariose entraine l’échaudage partiel des épis (échaudage de groupes d’épillets sur épi). Le cèphe est un insecte qui sectionne la tige. Par conséquent, lorsqu’on tire une plante atteinte, seul l’épi vient facilement.
Le champignon responsable du piétin échaudage est spécifique aux graminées. Sa gamme d’hôtes comprend les blés dur et tendre, l’orge et le brome. La source d’inoculum est constituée principalement par les résidus des cultures hôtes. L’inoculum du champignon s’accumule lentement dans le sol. La survie du champignon est de courte durée.
L’agent responsable du piétin échaudage se maintient dans la couche aérée du sol jusqu’à 5 à 10 cm, grâce à sa sensibilité au gaz carbonique. Les sols aérés, favorisent les contaminations par le piétin échaudage qui y trouve l’oxygène dont il a besoin et peu de gaz carbonique qui lui est néfaste. Ainsi, le piétin échaudage est moins fréquent en sol tassé ou lorsque l’aération du sol est faible. Pour limiter les attaques, il est donc recommandé de broyer finement et de répartir les résidus de paille.
Le champignon survit sous forme de mycélium saprophyte sur les résidus des cultures hôtes. C’est un mauvais compétiteur qui ne peut pas survivre sans sa base nutritive. Les plantes de blé sont infectées lorsqu’elles rentrent en contact avec des résidus infestés par le champignon.
C’est donc à partir des résidus proches des racines du blé que la colonisation va avoir lieu. L’infection va avoir lieu sur les poils absorbants ou les radicelles. A partir de cette base l’invasion va toucher tous les tissus racinaires.
Le piétin-échaudage est favorisé par un climat doux et pluvieux en automne. Aussi, les semis tardifs de fin novembre ou décembre sont généralement moins exposés aux attaques car les températures sont plus froides à cette époque.
Une fois qu’une infection est établie, le champignon se déplace d’une racine à une autre, infectant les racines d’autres plantes. Ce qui fait que l’infection par le piétin échaudage se manifeste sous forme de foyers plus ou moins larges de plantes malades. Puisque le développement de la maladie est favorisée par les conditions humides, les foyers sont souvent localisés dans les zones les plus humides ou les moins drainées.
Il existe ainsi deux phases d’infection du blé par le champignon du piétin échaudage. Une infection primaire qui a lieu en automne à partir de l’inoculum dans le sol et une infection secondaire (de plante à plante) qui a lieu au début du printemps. La maladie progresse aussi des racines vers le collet. Si le niveau de l’infection primaire est élevé, l’infection secondaire va être importante en temps humide et chaud. Les conditions optimales de son développement sont une humidité élevée du sol et une température du sol entre 10 et 20°C.
Le piétin échaudage est favorisé par la monoculture, les sols légers à pH alcalins et de faible fertilité, des hivers doux et humides et des printemps pluvieux et les semis précoces. La maladie peut se développer aussi dans les sols lourds. Aussi, la pratique du semis direct est favorable au développement du piétin échaudage. La sécheresse pendant le remplissage des grains accentue les symptômes et aggrave les dégâts. De même, la densité des plantes favorise le développement de la maladie, En effet, plus la densité de semis est élevée, plus le chevelu racinaire est dense. Ce qui fait que l’expansion du piétin échaudage est facilitée.
Lutte contre le piétin échaudage
Le piétin échaudage est causé par un champignon qui se conserve sur les débris des plantes hôtes dans le sol Ce qui fait que la lutte contre cette maladie se base sur des méthodes préventives qui défavorisent l’activité du champignon dans le sol.
Il est important d’abord que l’inoculum soit réduit au maximum en automne, pour cela il faut éviter toutes les situations qui lui permettent de subsister et de se développer, en particulier en évitant de laisser des résidus de récolte (chaumes) ou des repousses de céréales à paille ou des adventices (en particulier les graminées), à la surface du sol.
La maladie est affectée par la température et l’humidité du sol et aussi par les pratiques culturales. Puisque les facteurs climatiques ne peuvent pas être contrôlés, on peut alors agir sur les pratiques agronomiques pour ralentir le développement de la maladie. Ces pratiques correspondent aux rotations, au contrôle des adventices, à la gestion des résidus des cultures précédentes, et à la fertilisation azotée. Pour la lutte chimique, il n’ya pas de traitement curatif, mais le recours au traitement des semences avec des substances actives spécifiques, peut remédier partiellement à la maladie.
Rotation
La rotation avec des espèces non–hôtes comme les légumineuses ou bien la jachère travaillée est la méthode la plus efficace pour le contrôle du piétin échaudage. Il est important de contrôler les graminées hôtes (Bromus spp., Agropyron spp., Agrostys spp.) dans la rotation ou la jachère. En effet, le champignon du piétin échaudage recherche le plus vite possible un support vivant pour assurer sa survie, car ses capacités de survie en saprophyte sur les racines contaminées sont limitées. Il est donc essentiel de détruire les repousses de céréales dans l’inter-culture ainsi que les graminées adventices. Leur présence peut limiter fortement l’impact de l’allongement de la rotation en développant des sources d’inoculum.
L’agent pathogène se conserve sur les débris des plantes hôtes. La survie de l’agent pathogène est très faible en absence de ces résidus. Le champignon du piétin-échaudage est un faible compétiteur. Pour assurer sa survie, il recherche le plus vite possible un support vivant. Ce qui fait que le plus grand risque du piétin échaudage est associé en premier lieu à la monoculture (2 à 4 ans de blés successifs).
Labour
Les méthodes conventionnelles de labour sont plus utiles pour le contrôle du piétin échaudage que le non-labour. Les méthodes conventionnelles entrainent l’enfouissement des résidus et par conséquent leur décomposition rapide, ce qui affaiblit le champignon responsable du piétin échaudage. De même ces méthodes exposent le sol à plus de chaleur qui agit sur les structures de conservation du champignon en été.
Fertilisation azotée
Comme règle générale, les formes ammoniacales de l’azote (comme le sulfate d’ammonium) inhibent l’activité du piétin échaudage, en réduisant le pH autour des racines.
Traitement des semences
Les semences peuvent être traitées spécifiquement contre le piétin échaudage. Ce traitement n’est justifié que dans des situations à grand risque du piétin échaudage.
Deux substances actives sont préconisées dans ce traitement : Fluquinconazole et Silthiofam. Le traitement des semences ne contrôle que 50% du piétin échaudage dans le meilleur des cas.
Fusariose de l’épi
La fusariose de l’épi du blé est une maladie communément présente dans les pays à climat tempéré humide. Dans la région méditerranéenne, cette maladie peut se développer de temps en temps lorsque la période d’épiaison et de floraison coïncide avec un climat exceptionnellement humide comme c’était le cas de certaines régions du Maroc en 2013.
Cette maladie est importante non seulement à cause des pertes qu’elle engendre, mais surtout en raison de la production de mycotoxines par les agents pathogènes qui y sont associés. Ce qui fait que les pays, dont les céréales sont régulièrement attaquées par la fusariose, ont des législations qui limitent la concentration des mycotoxines dans les grains de céréales et les produits dérivés. Une quinzaine d’espèces de champignons sont responsables du développement de la fusariose. Les plus importantes sont : Fusarium graminearum, Fusarium culmorum et Michrodochium nivale.
Production de mycotoxines
Plusieurs mycotoxines sont produites par les espèces de Fusarium, dont la plus importante est la Dioxynivalenol (DON) ou Vomitoxine. La consommation en grande quantité de cette toxine entraine des vomissements, des maux de tête et de la fièvre. La quantité de la toxine DON tolérée est de 1 μg/kg/j.
L’observation des symptômes de la fusariose sur l’épi n’est pas une indication de la contamination des grains par les mycotoxines. Par contre, la présence de grains endommagés par la fusariose est un signe de la présence éventuelle des mycotoxines. Cependant, la relation entre le nombre de grains fusariés et la teneur en mycotoxines n’est pas toujours consistante. De plus, certaines espèces comme Michrodochium nivale ne produit pas de toxines. Ce qui fait qu’on ne peut pas généraliser et que chaque champ doit être considéré séparément. Ce sont les analyses des grains à la récolte qui permettent de déterminer les niveaux de leur contamination par les mycotoxines.
La gamme d’hôte des espèces de Fusarium est large. Chez les céréales, on trouve comme espèces hôtes: le blé dur, le blé tendre, le maïs, l’orge et l’avoine. Le blé dur est très sensible à la maladie.
Les agents responsables de la fusariose de l’épi se conservent sur la semence, les débris et dans le sol. La contamination et l’infection de l’épi du blé par les spores des espèces fusariennes est favorisée par des pluies fréquentes, des périodes prolongées d’humidité de saturation et un temps doux (optimum: 20°C) entre l’épiaison et la floraison. La maladie peut continuer son développement en présence de conditions humides après la floraison. Des pluies avant la récolte peuvent aggraver la contamination du grain par les mycotoxines
Les symptômes de la fusariose apparaissent sur blé, 2 à 3 semaines après la floraison. Ils commencent par une décoloration progressive d’un ou de plusieurs épillets. Ces symptômes évoluent pour donner le blanchiment prématuré d’une partie ou de la totalité de l’épi. Sur les épillets on peut parfois observer une coloration rose saumon sur les épillets infectés (Fig. 5).
Des lésions foliaires sont aussi associées à Michrodochium nivale,
A la maturité, les grains fusariés sont petits et ridés et à aspect crayeux.
La fusariose de l’épi entraine des dégâts à deux niveaux :
- Dégâts quantitatifs direct au champ : baisse de rendement, conséquence de l’avortement et de la baisse du poids des grains.
- Dégâts qualitatifs : baisse de la qualité technologique des grains infectés et contamination potentielle de ces derniers par des mycotoxines susceptibles de se retrouver dans l’alimentation humaine et animale.
Lutte contre la fusariose de l’épi
Appréciation du risque de la fusariose
Les principaux facteurs qui prédisposent le blé à la fusariose sont :
- La présence de débris d’un précédent à paille, du maïs ou du sorgho
- L’absence de rotation
- L’absence du travail du sol (no-till ou Zéro labour)
- La sensibilité variétale
- Le climat : temps doux et humide à la floraison
Ce qui fait que dans le cas de la fusariose, chaque parcelle de blé doit être jugée séparément en termes de risque de maladie et de sa gravité. L’évaluation du risque peut se faire à deux niveaux :
- Au début de la saison : risque agronomique (précédent, travail du sol, variété)
- Au moment de l’épiaison : risque climatique (temps humide et pluvieux autour de la floraison)
Méthodes de lutte préventive
La prévention de la fusariose doit reposer sur la combinaison de plusieurs méthodes : rotation, gestion des résidus de la culture précédente (labour), choix de la variété, gestion de l’irrigation et le recours éventuel aux fongicides. Dans le cas de l’irrigation, il convient de ne pas arroser le blé pendant une semaine après la sortie des étamines, étant donné qu’une forte humidité augmente le risque de la fusariose pendant la floraison.
Pour la résistance des variétés, il y’a peu d‘informations sur le comportement des variétés du blé cultivées au Maroc.
La lutte chimique est à elle seule insuffisante pour lutter contre la fusariose. Dans les meilleurs des cas, les fongicides ne permettent qu’une efficacité de 60%. Les traitements sont préventifs et doivent être appliqués juste avant la floraison lorsque le risque d’infection existe. La cible du traitement est l’épi. Les substances actives efficaces contre la fusariose de l’épi sont le Métconazole, et le Prothioconazole seul ou en association avec le Tébuconazole. Ces substances existent dans des spécialités fongicides homologuées sur blé au Maroc.
Figure 4. Piétin échaudage sur blé
Figure 5. Fusariose de l’épi sur blé dur