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Amandier : Qualité et valorisation du fruit des populations locales

Amandier : Qualité du fruit des populations locales

et possibilités de valorisation commerciale et industrielle

Kodad Ossama, Département d’Arboriculture Fruitière, ENA Meknes

Osama.kodad@yahoo.es

Au Maroc, la culture de l’amandier couvre une superficie de 144.228 ha (MAPM, 2010), représentant 71% de la superficie réservée aux rosacées fruitières, soit 1,5% de la superficie agricole utile. Elle est cultivée dans la plupart des zones agricoles du pays et sous des conditions environnementales différentes. Deux secteurs de production sont identifiés au Maroc: traditionnel et moderne. Le secteur moderne est caractérisé par des plantations régulières et homogènes. Le secteur traditionnel représente plus de 60% des superficies et se localise essentiellement en zones de relief (Azilal, Al Hoceima, Amezmiz,…).

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Les populations d’amandier constituant ce secteur sont issues du semis, les arbres de ces plantations sont très hétérogènes sur le plan vigueur, époque de floraison, époque de maturité et du fruit. Les études réalisées sur la qualité du fruit de ces populations ont révélés que cette dernière est généralement de faible valeur commerciale.  

La production de ce secteur est caractérisée par une variabilité interannuelle importante due à plusieurs facteurs liés:

– à la plante même : effet de la dépression due à la consanguinité

– à l’itinéraire technique : aucun apport de fertilisants, d’irrigation ou de traitements phytosanitaires et pas d’application de la taille de fructification et de régénération

– aux conditions climatiques : les gelées au moment de la floraison et la sécheresse accentuée durant l’été.

Concernant la qualité du fruit, elle est généralement considérée inférieure à celle des variétés introduites. En effet, l’amandon (partie comestible du fruit) de ces populations est de petit calibre, trop ridé, de couleur trop foncée et avec des pourcentages élevés de double amandons. Ces caractères réduisent la qualité du produit et les possibilités de commercialisation à grande échelle et à des prix permettant d’améliorer le revenu des agriculteurs.  

Qualité physique du fruit et possibilité d’amélioration

Le poids moyen de l’amandon des populations marocaines est généralement inférieur à 1 gramme (Tableau 1), ce qui réduit sa valeur commerciale. Cependant, le problème majeur de ces productions est la présence de fruits défectueux et l’hétérogénéité des lots commercialisés. Dans ce sens , la vente des amandons sous forme granulée, en lamelles fines et en bâtonnets permettra de présenter un produit homogène et de valeur commerciale plus élevée. Le faible calibre des amandons des populations locales est dû essentiellement au manque d’entretien. Cependant, il est possible d’améliorer le poids de l’amandon en apportant des irrigations au moins durant la phase de remplissage du fruit, généralement vers le début du mois de juin, et d’éviter la récolte en vert. En effet, les fruits avant la maturité présentent un amandon humide et turgescent et une fois récoltés à ce stade, ils commencent à se déshydrater rapidement donnant lieu à des amandons ridés et de faible poids. La récolte des arbres à amandons amères séparément permettra d’éviter la présence de ce type d’amandons dans les lots à commercialiser.

Par ailleurs, la plupart des amandons des populations locales est de forme elliptique à arrondie due probablement à l’utilisation des semis issus de la variété ‘Marcona’. Le fruit de cette variété, de forme arrondie et de gros calibre, est très apprécié sur le marché local et il est vendu à des prix élevés. Si les agriculteurs repèrent et récoltent les arbres qui produisent des fruits avec ces caractéristiques, ils peuvent vendre leurs productions à des prix relativement élevés.

Stockage

La présence des amandons âpres et aigres est généralement due à l’oxydation de l’huile d’amande durant de longue période de stockage dans des lieux insalubres. A noter que le stockage est une opération qui permet aux agriculteurs de vendre leurs récoltes à des prix élevés durant les périodes hors saisons. Pour éviter la détérioration de la qualité de l’amandon durant le stockage il est recommandé de stoker les fruits à coque dure (sans exocarpe) dans des lieux propres, secs et ventilés. Il est préférable de les stocker  dans des sacs en jute ou en polyéthylène à maille non serrée et placés sur des palettes en plastique.

Les études réalisées sur l’amandier au Maroc ont démontré que plus de 80% des arbres produisent des fruits à coque dure, avec des rendements commerciaux inferieures à 35% (Tableau 1). La dureté de la coque est un caractère important dans les conditions climatiques méditerranéennes et celles du stockage, puisqu’il offre une protection remarquable contre l’attaque des insectes. Par contre, les variétés à coque tendre sont facilement attaquées par les insectes et les maladies cryptogamiques, soit avant la récolte ou bien durant les opérations de la récolte, du ramassage et du stockage. Dans ce sens, les agriculteurs sont appelés à identifier les arbres en fonction de la dureté de la coque pour séparer les fruits à coque dure de ceux à coque tendre durant la récolte et le stockage, et par conséquent, éviter l’infestation et l’infection de la récolte.

Récolte

La récolte est déterminante pour maintenir le fruit dans un état approprié pour la commercialisation. L’opération doit se réaliser une fois le mésocarpe (partie verte du fruit) est ouvert et desséché. Ce stade phénologique facilitera le détachement du fruit de l’arbre, sachant que la récolte se réalise généralement par gaulage, opération destructive et nuisible pour la production de l’année suivante. En effet, les rameaux porteurs du fruit sont à la fois ceux qui supportent les bourgeons qui vont se différencier en fleurs pour l’année suivante. Donc, il est recommandé de laisser le fruit jusqu’atteindre sa maturité et de commencer la récolte en secouant les rameaux à leur base en évitant tout contact avec les parties porteuses du fruit. L’installation de bâches sous la frondaison de l’arbre permettra d’éviter le contact du fruit avec le sol et par conséquent réduire les infections et l’adhésion des débris. Après le ramassage du fuit, il est indispensable de séparer l’exocarpe de la coque et de stocker la récolte dans un lieu bien entretenu et ventilé.

Concassage

Au Maroc, le concassage des amandes se réalise généralement manuellement. Cette opération, pénible et coûteuse, a entravé le développement de la culture de l’amandier et la valorisation de la production. Cependant, l’introduction des unités de concassage des amandes adaptées aux fruits à coque dure a constitué un événement important pour le développement et la valorisation du produit issu de ces populations. Pour que ces unités fonctionnent correctement (pourcentage faible de fruits endommagés), il faut respecter les conditions suivantes avant la mise en marche des machines:

– le fruit doit être libre de son exocarpe,

– réhydrater du fruit,

– éliminer les débris

– trier les fruits en fonction de la forme.

Qualité chimique de l’amandon et possibilité de transformation industrielle

Les études réalisées dans le cadre du projet PAF/MCA sur la composition chimique des fruits de ces populations ont montrés que la plupart des échantillons présentent des taux élevés en huile et en protéine (Tableau 2). Le rapport huile/protéine est utilisé dans l’industrie agroalimentaire pour la fabrication des pâtes d’amande, puisqu’il agit sur la capacité d’absorption de l’eau par ces pâtes. En effet, plus élevé est le contenu en lipide, moindre est l’absorption de l’eau. Ainsi, il est préférable que cet indice soit faible pour la production du massepain, alors que pour la production du nougat doux, on préfère plutôt un indice élevé. La pâte d’amande peut être fabriquée suivant des procédures traditionnelles simples et faciles à réaliser.

L’huile d’amande est un produit très apprécié par le consommateur pour des usages médicinaux grâce à ses propriétés antioxydantes. Généralement, l’huile est extraite des amandons endommagés durant l’opération du concassage et ceux qui présentent une qualité physique inadéquate (calibre faible, ridés etc). Les techniques utilisées pour l’extraction de l’huile d’argan peuvent être adaptées pour l’amandier. La fabrication des pâtes traditionnelles et l’extraction de l’huile d’amande sont des possibilités faisables pour la valorisation de la production de l’amandier locale au Maroc, surtout dans les zones de montagne.

La production de l’amande en poudre est également l’une des voies à prospecter pour la valorisation de cette production. A noter que les amandons présentant des taux faibles en  huile et élevés en protéine sont les plus appropriés pour obtenir des amandes en poudre de qualité.

Conclusion

La valorisation de la production locale de l’amandier doit passer premièrement par l’amélioration des conditions de culture des plantes pour obtenir une production adéquate et de bonne qualité physique. L’adoption des bonnes conduites durant la récolte (respect de la date de récolte, collecte séparée des fruits en fonction de la dureté de la coque, etc) et le stockage (utilisation des sacs à maille non serrée et des palettes en plastique, nettoyage et ventilation des lieux…) par les agriculteurs permettra d’obtenir un fruit avec un poids adéquat et de réduire les infections et la détérioration du fruit durant le stockage. L’organisation des agriculteurs en coopératives permettra l’installation de petites unités de transformation pour la production de nouveaux sous-produits artisanaux, essentiellement l’huile d’amande, les pâtes d’amandes et les nougats. L’intégration de la femme dans ces coopératives pour réaliser ces activités offrira la possibilité d’avoir des produits de qualité supérieure et par conséquent d’améliorer le revenu des ménages au niveau des régions de production.

 

Tableau 1. Caractères physiques des amandons des populations locales de l’amandier au Maroc

Population Poids

 de l’amandon (g)

Longueur

de l’amandon (mm)

Largueur

 de l’amandon (mm)

Rendement

Commercial (%)

Aknoul 0,93±0,26 21,7±3,22 12,7±1,21 22,1±3,4
Azilal 0,92±0,12 22,6±1,67 13,2±0,55 22,3±2,3
BniMellal 0,70±0,17 18,7±2,98 11,8±1,17 25,6±3,5
Al-Hoceima 1,11±0,25 24,5±2,09 13,7±1,63 30,2±14,5
Sfasif 1,05±0,40 22,6±4,34 13,4±2,18 35,2±6,7

 

Tableau 2. Caractères chimiques des amandons des populations locales de l’amandier au Maroc

Population Taux en huile (% MS) Taux en protéine (% MS) Rapport huile/protéine
Aknoul 56,7 25,08 2,34
Bni Mellal 55,12 26,72 2,13
Azilal 58,72 21,42 2,88
Sfassif 56,01 27,66 2,04
Al-Hoceima 53,6 26,12 2,05

 

 

 

 

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