Les superficies cultivées en chou pommé au Maroc sont en constante augmentation et atteignent actuellement autour de 2.000 ha. Il peut être cultivé dans plusieurs régions agricoles marocaines en alternant les différentes variétés disponibles et leurs périodes de plantation. Mais sa culture prospère essentiellement sur les zones côtières à cause de l’amplitude thermique relativement faible car les fortes fluctuations entre les températures de jour et de nuit lui sont nuisibles.
Préparation du terrain
Toutes les variétés de chou sont adaptées tant aux sols légers qu’aux sols lourds. Cependant, ils apprécient en général les sols profonds, bien drainés, humides, à tendance calcaire et assez bien fumés. Il est nécessaire de préparer le terrain sur une profondeur de 20 à 30 cm pour, d’éliminer les plus gros cailloux, les mauvaises herbes et leurs racines puis briser les mottes et niveler le sol. En outre, le chou pommé étant très gourmand, un engrais de fond minéral ou un engrais organique bien décomposé est indispensable. Cependant, il faut savoir qu’une terre trop riche favorise le développement de champignons, l’atrophie ou l’éclatement des petites pommes. La plante est moyennement sensible à la salinité et la valeur de 3 mmhos/cm est considérée comme seuil maximum de la conductivité électrique du sol.
Du fait de ses exigences, il est conseillé de ne pas faire revenir le chou pommé au même emplacement avant 3 ou 4 ans. Une alternance avec une culture de petits pois ou de fèves, ou encore de pommes de terre précoces serait indiquée.
Variétés : qu’est ce qui oriente le choix des producteurs ?
Plusieurs variétés classiques étaient anciennement utilisées au Maroc, mais elles sont en train de perdre leur importance et la tendance est une évolution vers le recours aux hybrides qui représentent actuellement 85% des cultures et atteindra rapidement (1-2 ans) les 100% en raison des avantages évidents et sous l’impact des exportations vers l’Afrique. Ces variétés hybrides apportent de nombreux avantages dont une meilleure qualité, un rendement plus élevé, une meilleure résistance au transport et des résistances aux maladies dont celle au Xantomonas récemment introduite.
Parmi les semenciers leader sur ce créneau on peut citer : Bejo Zaden, Rijk Zwaan, Tokita seeds et Sakata Seeds.
A noter que les surfaces allouées au chou ont progressé ces dernières années au détriment du chou-fleur. La même tendance observée pour le brocoli.
Préparation des plants
Comme pour le chou fleur, deux périodes de semis sont pratiquées : été et hiver, d’où l’importance du choix des variétés adaptées à chaque cycle pour éviter notamment le risque de montée en graine. De germination facile, les choux peuvent être semés par les producteurs pour préparer eux même leurs plants dans des planches en pleine terre. La germination a lieu au bout de 3 à 4 jours si la température est de 25°C environ et les plants sont prêts après un séjour de 45 jours. Cette longue durée s’explique par le fait que les producteurs attendent que les plantules commencent à se lignifier pour qu’elles ne cassent pas lors de l’arrachage. Pour éviter ce problème, certains utilisent de la tourbe dans des planches à sol bien décompacté afin de faciliter le prélèvement des plantules au bout de 25-30 jours. Ils peuvent aussi, comme les frères El Aloua Simohamed et Said, producteurs bien connus de la région de Médiouna, recourir à une pépinière professionnelle.
Les producteurs doivent veiller à bien sélectionner les plantules à mettre en place càd les plus grosses et plus droites possédant au moins 5 ou 6 feuilles et les installer dans un sol humide, arrosé préalablement pour faciliter la reprise. De même, lors de la transplantation, il faut éviter les plants qui ne sont pas en bon état ou ceux dont le bourgeon terminal a été atrophié par une piqûre d’insecte. On les nomme ‘’choux borgnes’’ et ils ne donnent pas de pommes. Après la plantation, il est en général nécessaire de ramener la terre au pied des plantes afin de renforcer leur ancrage.
A noter que certains grands producteurs se sont équipés en transplanteuses, ce qui a contribué à l’augmentation des superficies et de la production.
Plantation
Classiquement la plantation se fait en lignes simples espacées de 80-90 cm avec une distance sur la ligne de 33 cm entre plants. La densité est de 33.000 plants par hectare. Un autre système est pratiqué par certains producteurs expérimentés comme les frère El Aloua, qui optent pour la plantation en planches avec 2 ou 3 lignes jumelées, distantes de 33 cm entre lignes et de 33 cm entre plants sur la ligne de plantation. Les lignes sont regroupées dans des planches distantes de 80 cm permettant le passage d’un tracteur à roues étroites pour les travaux. ‘‘La plantation en planches offre la possibilité de la mise en place d’un nombre de plants plus élevé à l’hectare (48-50.000) permettant l’obtention d’un bon rendement, de pommes de meilleure qualité, de calibre commercialement adéquat (1,5-2 kg) et un meilleur prix de vente’’ expliquent-t-ils.
Le nombre de jours nécessaires depuis la plantation jusqu’à la maturité et sous des conditions optimales de croissance est de l’ordre de 2 à 3 mois ou plus, selon les variétés précoces ou tardives des différents types de choux. Le chou lisse par exemple peut commencer plus tôt que le chou frisé.
Entretien de la culture
Une fois les opérations semis et transplantation réussies, la culture devient plus facile. Les binages et sarclages d’entretien sont à réaliser durant toute la croissance des choux pommés. La limace est une grande dévoreuse des jeunes plants fraîchement repiqués. Afin qu’elle ne ruine pas les plantations, des pièges anti-limaces peuvent être disposés autour des plants.
Globalement, tous les travaux dans les champs de choux sont manuels, exigeants en main d’œuvre, sauf chez certains producteurs qui utilisent les tracteurs pour les travaux mécanisés de préparation des planches de plantation ou pour les traitements phytosanitaires
Irrigation
Le mode d’irrigation au goutte à goutte est actuellement adopté par presque tous les producteurs. Pour la conduite de l’irrigation, et une fois la culture installée, il est recommandé de l’assoiffer légèrement afin de favoriser le développement radiculaire. Les besoins en eau de la culture doivent être bien satisfaits, particulièrement à partir de la mi croissance et en période de floraison (pour le chou fleur). Le chou craint les longues périodes de sécheresse, d’où la nécessité de l’arroser régulièrement, surtout par temps sec, mais modérément de manière à maintenir une bonne humidité. Les besoins hydriques des choux varient de 300 à 400 mm pour des cycles de culture variant de 90 à 120 jours. Comme pour les cultures foliacées en général, c’est pendant le dernier mois de culture que la plante absorbe 60 à 75 % de ses besoins en eau et en éléments nutritifs.
Fertilisation
Les choux ont besoin d’une bonne fumure riche en azote et en potasse. Une fumure organique de 30 T/ha est vivement recommandée pour les choux. Les doses de fumures minérales conseillées sont les suivantes: 100, 110, 330 et 100 kg/ha, respectivement pour N, P205, K20 et MgO. L’azote est le pivot de la fertilisation des choux, surtout en couverture. La fertilisation adoptée en général est de 90 à 200 kg/ha d’azote, 60 à 200 kg/ha P205 et 60 à 200 kg/ha K20. Des engrais à libération lente sont préférés à l’urée et à l’ammonitrate. L’apport de soufre est également important: 40 à 60 kg/ha. Il contribue fortement à l’acidification des sols basiques marocains.
A ce sujet, la carence en bore peut être induite dès que le pH du sol est supérieur à 6. Les choux sont parmi les espèces les plus exigeantes en bore. Le sol doit doser une teneur supérieure à 0,5 ppm.
Le chou est moyennement sensible à la salinité due à NaCl de l’eau d’irrigation. Le potentiel de production est atteint à des eaux n’excédant pas 2 mmhos/cm. Si cette valeur est dépassée, il faut s’attendre à des baisses de rendement.
Pour aider la pomme à bien se former, on peut apporter un supplément d’engrais, selon le climat et les conditions de production.
Par ailleurs, les choux sont très exigeants en lumière. En effet, lorsque les facteurs eau et éléments nutritifs ne sont pas limitants, le taux de matière sèche produite est proportionnel à la quantité de rayonnement solaire intercepté par la culture.
Lutte phytosanitaire
En cas de monoculture, il y a un fort risque de Sclérotinia (surtout chez le chou fleur).
Les principaux parasites sont :
– Altemaria brassicicola: Ce champignon peut contaminer la graine et détruire la jeune plantule très précocement. Les fongicides à base de manèbe ou de zinèbe sont efficaces contre ce champignon.
– Phoma lingam est un champignon responsable du symptôme “pied noir” ou “black leg”, Il provoque une nécrose du collet et une destruction des racines. Il a été établi que ce champignon se conserve dans les débris de récolte. Les variétés hybrides cultivées actuellement sont résistantes à ce champignon.
– Peronospora parasitica est l’agent causal du mildiou. Il débute par des tâches légèrement jaunâtres sur la face supérieure des feuilles et blanchâtres à leur face inférieure. Le mildiou est la maladie la plus courante pour le chou pommé. Il convient alors de détruire les plants atteints. Le contrôle chimique de la maladie s’opère par de nombreux fongicides (Antéor, par exemple).
– Pythium sp est l’agent de la fonte de semis (on utilise le cryptonol).
– Plasmodiophora brassicae est le champignon responsable de la hernie du chou (excroissances racinaires qui provoquent un flétrissement rapide et la mort de la plante). La maladie est associée à des pH acides du sol (pH= 5.5 à 6).
– Puceron cendré du chou (Brevicoryne brassicae) est un insecte qui vit exclusivement sur les crucifères et chou suce la sève des feuilles. Ses piqûres causent des tâches jaunes et une déformation des feuilles. Il est de couleur vert foncé. L’abondance des pucerons est liée aux températures douces. Des pluies fréquentes et une forte humidité relative lui sont très défavorables. Les pucerons pullulent souvent soit au cœur même des jeunes plants soit au revers de feuilles. Il s’en suit un jaunissement partiel, parfois un arrêt de la végétation voire un dépérissement.On peut facilement les éliminer en effectuant des pulvérisations d’anti-Pucerons à base de Pyrèthre.
– Piéride du chou (Pieris brassicae) est un insecte dont les larves rongent les tissus des jeunes plants et spécialement des feuilles qui prennent l’aspect de dentelle.
– Noctuelles (lépidoptères) peuvent attaquer la partie aérienne de la plante. La plupart des chenilles ne s’alimentent que la nuit.Pendant le jour, elles sont cachées dans le sol, à une faible profondeur. Quand les choux sont bien développés, au lieu de s’enfoncer dans le sol, les chenilles restent à l’intérieur des pommes pendant la journée.
– Noctuelle du chou (Mamestra brassicae) est très nuisible et très polyphage. Ses chenilles peuvent atteindre 40 à 45 mm. Elles sont très voraces et consomment le feuillage, creusent les galeries et souillent fortement les pommes par l’abondance de leurs excréments. La lutte biologique à base de Bacillus thurigiensis est efficace contre les noctuelles et les piérides.
– Thrips (Thrips tabaci) présentent, à leur tour, un grand danger à la culture. Les adultes pénètrent dans la pomme par la base.Ils profitent du relâchement de la pomme au stade de la maturité pour pénétrer profondément. Les thrips injectent leur salive toxique dans les parenchymes sous-épidermiques et provoquent des cécidies (petites galles) et des plages liégeuses brunâtres. La lutte chimique utilisant le méthomyl (Lannate) ou la lambda cyahalothrine (Karaté) est d’une faible efficacité.
– La mouche du chou est un ravageur dont les larves creusent des mines vers le bas des plants, allant jusqu’à détruire les racines et faire mourir les choux. Butter les jeunes plants et protéger leurs collets permet de réduire les risques. Enfin, placer un Filet Anti-Insectes lors de la mise en place des plants empêche les femelles d’y pondre leurs œufs.
Cependant, en période de froid et selon les producteurs interrogés, il n’y a ni maladies ni insectes et seuls quelques traitements insecticides sont pratiqués.
Désherbage :
Il se fait avant plantation par le travail du sol et par traitement chimique. Après plantation le désherbage est mécanique. Les grandes feuilles des choux limitent la pousse des mauvaises herbes, mais elles attirent les insectes.
Récolte
Pour savoir si les choux pommés sont bons à récolter, on peut appuyer sur le sommet de la tête avec le bout des doigts et sentir une résistance traduisant la fermeté du légume. La récolte est essentiellement manuelle, s’étalant sur 20 à 30 jours et le nombre de cueillettes est de 3 à 5. La coupe se fait juste en dessous de la tête avec un couteau et les pommes sont nettoyées sur le terrain en éliminant les feuilles externes endommagées. Si la récolte est tardive, les parties récoltées deviennent fibreuses et perdent de leur qualité.
Après la récolte, il faut arracher tous les trognons restants en terre et effectuer un bon labour en apportant une fumure organique bien décomposée, car ce légume épuise le sol.
A gauche M. Abdelhak Rochdi (Société Pionagri) et au centre les frères El Aloua, producteurs de chou bien connus dans la région de Médiouna
Coût de production
Il varie selon les producteurs et les pratiques adoptées. Il est estimé à 40.000 dh/ha (pour le cas de plantation jumelée). De même, les prix de vente sont variables et dépendent de la qualité de la production, du prix du marché et des producteurs (négociations).
Commercialisation
En plus du marché marocain, le chou est exporté vers les pays d’Afrique subsaharienne comme la Mauritanie, le Sénégal, le Mali, etc. Cependant, au-delà de la Mauritanie, le transport nécessite le froid ce qui augmente les charges.
A noter que pour préserver l’état de leurs routes qui risquent de souffrir de la circulation des poids lourds, certains pays comme la Mauritanie ont limité le poids autorisé aux camions TIR à 28 tonnes ce qui renchérit encore plus les frais du transport.