Le Conseil Oléicole International réunit ses membres à Madrid
Le 25 juin dernier, Madrid a accueilli la session plénière de la 119e réunion du Conseil des membres du Conseil Oléicole International (COI). Cet événement a rassemblé au siège de l’Organisation les délégations des 20 États membres, représentant 94% de la production mondiale d’huile d’olive et d’olives de table. La réunion a été l’occasion de discuter des progrès réalisés en 2024, des projets futurs, ainsi que des défis et opportunités du secteur oléicole mondial. L’occasion également de souhaiter la bienvenue aux deux pays qui ont adhéré récemment à l’Accord international sur l’huile d’olive et les olives de table : l’Azerbaïdjan et la Bosnie-Herzégovine.
Lors de cette réunion qui a connu la présence des ambassadeurs de nombreux pays, le ministre espagnol de l’Agriculture, Luis Planas, a rappelé que le changement climatique est l’un des défis les plus importants de l’humanité et que « pour faire face aux pénuries d’eau ou à l’apparition d’éventuels ravageurs et maladies, nous devons nous concentrer sur l’innovation ». À cet égard, il a souligné l’importance de l’accord récent entre le COI, le gouvernement espagnol et la FAO visant à inclure la banque internationale de germoplasme d’olivier de Cordoue dans le cadre du Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (TIRPAA). « Le multilatéralisme et la coordination internationale sont fondamentaux », a-t-il déclaré. « Nous avons besoin de réponses coordonnées et précises. C’est pourquoi le rôle du COI est stratégique. »
À l’occasion de cette 119e session, des décisions importantes ont été adoptées par le Conseil des membres concernant notamment la révision de la méthode d’évaluation organoleptique de l’huile d’olive vierge, la Norme commerciale du COI applicable aux huiles d’olive et aux huiles de grignons d’olive, ainsi que des protocoles d’accord avec un certain nombre d’institutions, telles que le Conseil national de la recherche espagnol ou le Centre oléicole de l’Université de Californie à Davis.
La session a été suivie d’événements clés pour le secteur tels que la cérémonie de remise des prix du Concours Mario Solinas (le 25 juin) et le Congrès mondial de l’huile d’olive OOWC (du 26 au 28 juin).
Remise des prix de la qualité Mario Solinas 2024
Selon les résultats de la 24e édition du concours Mario Solinas Quality Awards – Hémisphère Nord, organisé par le Conseil oléicole international (COI), la Tunisie, l’Espagne et l’Italie continuent de dominer le podium de la qualité des huiles d’olive extra vierges dans le monde.
– Dans la catégorie Fruité vert robuste, la médaille d’or a été décernée à Aziende Agricole di Martino de Trani (Italie). Le premier prix dans la catégorie Fruité vert moyen a été décerné à Accademia Olearia d’Alghero (Italie).
– La meilleure huile d’olive au fruité vert délicat de cette édition est venue de l’huilerie tunisienne Adonis, située à Slouguia. Dans la catégorie Fruité mûr, le jury international – composé de chefs de jurys de dégustation reconnus par le COI– a attribué la note la plus élevée à l’huile présentée par le Domaine Fendri, à Sfax (Tunisie).
– Dans les catégories Petits Producteurs et Conditionneurs, les médailles d’or ont été décernées respectivement à l’huilerie La Loma de Canena (Espagne) et à Aceites Oro Bailén Galgón 99, Villanueva de la Reina (Espagne).
Première édition du Congrès Mondial de l’Huile d’Olive
La première édition du Congrès mondial de l’huile d’olive (OOWC) s’est tenue à Madrid du 26 au 28 juin. Durant ces trois jours, plus de 300 participants de 25 nationalités se sont réunis au siège du Centre national de recherche espagnol (CSIC) pour discuter des défis et des potentialités du secteur de l’huile d’olive, en mettant l’accent sur le changement climatique.
La séance d’ouverture a connu la présence de ministres de l’agriculture de plusieurs pays, démontrant l’intérêt de ces pays pour la recherche de solutions technologiques aux nouveaux défis auxquels est confrontée l’oléiculture méditerranéenne. Dans son allocution inaugurale, M. Abdessalem Loued, président du Comité consultatif du COI, a souligné la nécessité d’innover : « La qualité est essentielle pour conquérir les grands marchés qui ne sont pas encore convaincus de l’utilisation de l’huile d’olive dans leur alimentation. Nous devons produire de la qualité et offrir aux consommateurs du monde entier ce produit au meilleur prix possible et, pour cela, nous avons besoin d’innovation ».
Les discours d’ouverture ont été suivis par la conférence inaugurale de M. Jaime Lillo López, directeur exécutif du COI, qui a souligné la nécessité de « produire davantage et de manière durable, tout en faisant face aux défis de la mondialisation et du changement climatique ».
La clôture de l’OOWC a compté sur l’intervention du ministre espagnol de l’Agriculture, Luis Planas, qui a souligné que l’huile d’olive « est un élément unique du régime méditerranéen, mais ce n’est pas seulement un produit alimentaire, elle façonne un style de vie et une culture gastronomique qui signifie santé et avenir ». « Nous élaborons des politiques basées sur des preuves scientifiques, ce qui est fondamental pour pouvoir faire face à tous les défis futurs qui nous attendent », a-t-il ajouté.
Le congrès était divisé en huit segments, chacun portant sur différents aspects de la chaîne de valeur du produit. De nombreux dirigeants et experts ont partagé leur expérience dans la mise en œuvre de politiques visant à développer le secteur dans un contexte de changement, tant dans la phase de production que dans la situation actuelle du marché.
Production en baisse de 25%: Des scénarios complexes!
Face au réchauffement climatique qui affecte les cultures et entraîne une hausse des prix, les producteurs d’huile d’olive intensifient leurs efforts pour développer des solutions en collaboration avec la communauté scientifique.
Jaime Lillo López a déclaré lors de conférence mondiale sur l’huile d’olive : « Le changement climatique est devenu une réalité à laquelle nous devons nous adapter ». Cette réalité est douloureuse pour l’ensemble du secteur, qui fait face depuis deux ans à une baisse de production sans précédent, en raison des vagues de chaleur et de la sécheresse extrême dans les principaux pays producteurs.
Selon le Conseil national de l’huile d’olive, la production mondiale est passée de 3,42 millions de tonnes en 2021-2022 à 2,57 millions de tonnes en 2022-2023, soit une baisse d’environ 25%. En se basant sur les données envoyées par les 37 pays membres de l’organisation, on prévoit une nouvelle baisse de la production en 2023-2024 à 2,41 millions de tonnes.
Cette situation a conduit à une hausse significative des prix, de 50% à 70% selon les variétés concernées au cours de l’année écoulée. En Espagne, qui fournit la moitié de l’huile d’olive mondiale, les prix ont triplé depuis le début de 2021, suscitant le mécontentement des consommateurs. Le gouvernement est intervenu en supprimant la TVA sur ce produit.
Pedro Barato, président de l’organisation professionnelle de l’huile d’olive en Espagne, a affirmé que « la tension sur les marchés et la hausse des prix constituent un test très délicat pour notre secteur » , ajoutant : « Nous n’avons jamais connu une telle situation » .
« Nous devons nous préparer à des scénarios de plus en plus complexes qui nous permettront de faire face à la crise climatique », a-t-il ajouté, comparant la situation des producteurs d’olives aux « perturbations » qu’a connues le secteur bancaire lors de la crise financière de 2008.
Actuellement, plus de 90% de la production mondiale d’huile d’olive provient du bassin méditerranéen. Cependant, selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), cette région, qualifiée de « point chaud » du changement climatique, connaît un réchauffement 20% plus rapide que la moyenne mondiale.
Cette situation pourrait affecter la production mondiale à long terme. Yorgos Kouboris, chercheur à l’Institut grec de l’olive, a déclaré : « Nous faisons face à une situation délicate, qui impose de changer notre manière de traiter les arbres et le sol ».
Pour sa part, Jaime Lillo a expliqué que « l’olivier est l’une des plantes qui s’adapte le mieux au climat sec. Mais en cas de sécheresse extrême, il active des mécanismes pour se protéger et cesse de produire. Pour obtenir des olives, un minimum d’eau est nécessaire ».
Génétique et irrigation de précision
Parmi les solutions proposées lors de la conférence à Madrid, on trouve la recherche génétique. Depuis des années, des centaines de variétés d’oliviers sont testées pour identifier celles qui sont les plus adaptées au changement climatique, en se basant notamment sur leur période de floraison. L’objectif est d’identifier des variétés qui nécessitent moins d’heures de froid en hiver et sont plus résistantes au stress dû au manque d’eau à des moments clés de l’année, comme le printemps.
Un autre domaine principal de recherche concerne l’irrigation, que le secteur souhaite développer en stockant l’eau de pluie, en recyclant les eaux usées ou en dessalant l’eau de mer, tout en améliorant son efficacité. Cela implique notamment d’abandonner l’irrigation de surface (là où elle est encore pratiquée) au profit des systèmes de goutte à goutte, qui acheminent l’eau directement aux racines des arbres et permettent d’éviter le gaspillage.
Pour s’adapter au nouveau climat, une troisième approche plus radicale est envisagée, consistant à abandonner la production dans des zones susceptibles de devenir trop arides et à la développer dans d’autres régions. Cette tendance a déjà commencé, bien que de manière limitée, avec l’apparition de nouvelles plantations dans des régions jusqu’alors peu propices à la culture des oliviers, selon Jaime Lillo, qui se dit « optimiste » quant à l’avenir malgré les défis auxquels le secteur est confronté. Lillo promet que « grâce à la coopération internationale, nous parviendrons progressivement à trouver des solutions ».