Santé des plantes et durabilité : les enseignements du 13ᵉ Congrès de l’AMPP

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Le 13ᵉ Congrès de l’Association Marocaine de Protection des Plantes s’est tenu à Rabat les 8 et 9 avril 2025, rassemblant des experts, chercheurs, producteurs et acteurs du secteur agricole autour des enjeux de la protection phytosanitaire au Maroc. Cet événement très attendu par la profession, a permis de faire le point sur les dernières avancées en matière de lutte contre les ravageurs, l’utilisation des biopesticides, les innovations technologiques et les stratégies pour une agriculture durable. Plus de 300 participants, issus du monde académique, professionnel et institutionnel, ont pris part aux débats pour partager leurs connaissances et expériences sur la protection des cultures dans le contexte marocain et international.

La stratégie de développement agricole au Maroc met en évidence l’importance de la protection des cultures pour faire face à la pression grandissante des bioagresseurs et intensifier les productions agricoles, notamment à travers l’usage des pesticides. Toutefois, l’utilisation des pesticides fait désormais l’objet de préoccupations majeures, tant au niveau national qu’international, en raison de leurs impacts potentiels sur la santé humaine et l’environnement. Ainsi, la gestion raisonnée des pesticides est devenue indispensable pour assurer la pérennité de l’agriculture et répondre aux objectifs de développement durable.

Au fil des années, le Maroc a progressivement renforcé ses capacités à travers les services agricoles, les organismes de contrôle, les acteurs professionnels et les producteurs, en investissant dans les infrastructures nécessaires à une gestion rigoureuse et responsable des pesticides. Ces efforts concertés ont concerné plusieurs domaines : institutionnel, réglementaire, professionnel et technique, mobilisant ainsi l’ensemble des parties prenantes tout au long du cycle de vie des pesticides, de leur homologation jusqu’à leur élimination.

Consciente de ces enjeux, l’AMPP a organisé ce congrès qui a rassemblé les acteurs du secteur, autour d’un riche programme de présentations orales et d’affiches scientifiques et techniques abordant une diversité de thématiques actuelles.

Mise sur le marché

Les premières interventions ont porté sur la réglementation entourant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. Les experts ont rappelé que ces produits, incontournables pour lutter contre les ravageurs des cultures, sont encadrés par la loi 34-18 promulguée en 2021. Cette législation impose une autorisation préalable et un contrôle strict des substances actives et des préparations commerciales afin de garantir la sécurité sanitaire et environnementale.

Le processus d’homologation des produits phytopharmaceutiques a été longuement discuté, notamment les étapes d’évaluation des risques, les essais d’efficacité en conditions réelles et les analyses de résidus. Les intervenants ont souligné que la lenteur de ce processus peut retarder l’introduction de nouvelles solutions sur le marché, en particulier pour les produits à faible risque. Des propositions ont été faites pour améliorer la coordination entre les autorités réglementaires et les laboratoires afin de réduire les délais sans compromettre la rigueur scientifique.

Des échanges ont également porté sur la conformité aux normes internationales, notamment vis-à-vis des exigences européennes concernant les résidus de pesticides dans les fruits et légumes. Les nouvelles réglementations européennes imposent des limites maximales de résidus (LMR) toujours plus strictes, obligeant les producteurs marocains à adapter leurs pratiques agricoles. Les intervenants ont recommandé de renforcer la formation des agriculteurs sur les bonnes pratiques de traitement pour réduire les résidus dans les récoltes tout en garantissant leur conformité aux exigences des marchés d’exportation.

Évolution de la réglementation

L’évolution de la réglementation depuis les années 1920 a été largement abordée. Les experts ont rappelé que les premières lois, datant de l’époque coloniale, visaient surtout à réguler l’importation et l’utilisation des produits dangereux. Au fil des décennies, les lois se sont progressivement adaptées aux préoccupations sanitaires et environnementales, jusqu’à l’instauration de l’ONSSA qui a renforcé les normes de sécurité sanitaire et la gestion des intrants agricoles.

Les discussions ont aussi porté sur l’adaptation constante de la réglementation face aux avancées scientifiques et aux attentes sociétales. Les participants ont proposé d’élaborer des lignes directrices plus spécifiques pour certaines filières agricoles, notamment les cultures maraîchères et arboricoles où l’usage intensif de pesticides reste fréquent. Des exemples concrets de stratégies de gestion intégrée associant lutte chimique et biocontrôle ont été présentés pour réduire les impacts négatifs sur l’environnement tout en assurant une efficacité optimale contre les ravageurs.

Biopesticides et lutte biologique

L’intégration des biopesticides dans les stratégies de protection des cultures a été largement discutée. Ces produits, issus de micro-organismes, de plantes ou de substances naturelles, offrent selon les cas un complément ou une alternative durable aux pesticides de synthèse. Les intervenants ont présenté des études de cas mettant en évidence l’efficacité de certains biopesticides microbiens contre des maladies telles que le mildiou et l’oïdium.

Cependant, les défis persistent quant à la stabilité des formulations et leur efficacité en conditions réelles. Les experts ont insisté sur la nécessité de développer des produits plus robustes et d’améliorer les protocoles d’application pour garantir leur performance sur le terrain. Des initiatives pour promouvoir la recherche appliquée en biopesticides ont également été évoquées.

Gestion des risques sanitaires

La sécurité des utilisateurs des produits phytopharmaceutiques a fait l’objet de plusieurs interventions. Les experts ont souligné que l’utilisation des pesticides expose les agriculteurs à des risques sanitaires importants, notamment en cas de non-respect des doses ou de mauvaise manipulation. La formation aux bonnes pratiques et l’adoption d’équipements de protection individuelle (EPI) adaptés ont été identifiées comme des leviers essentiels pour réduire les risques d’intoxication.

Des campagnes de sensibilisation ciblées ont été recommandées pour renforcer la prévention, en particulier dans les zones rurales où les connaissances sur les dangers des pesticides restent limitées. La gestion des déchets phytosanitaires a également été abordée, avec des propositions pour améliorer la collecte et le traitement des emballages vides afin de limiter la contamination des sols et des eaux.

Innovations technologiques

Le congrès a également mis en avant les innovations technologiques, notamment l’usage de capteurs pour le suivi des paramètres environnementaux et la détection précoce des maladies. Ces technologies permettent aux producteurs de prendre des décisions plus éclairées en matière de traitement, limitant ainsi l’usage excessif de produits chimiques.

Des exemples d’applications pratiques ont été présentés, comme l’utilisation de drones pour surveiller l’état sanitaire des cultures et appliquer des traitements de manière ciblée. Ces innovations offrent un potentiel considérable pour améliorer l’efficacité des pratiques phytosanitaires tout en réduisant les coûts et l’empreinte écologique.

Les échanges ont également porté sur l’importance de renforcer la vulgarisation de ces technologies auprès des petits producteurs, afin de favoriser une adoption plus large et plus rapide.

AMPP, un pilier de la lutte phytosanitaire au Maroc

L’Association Marocaine de Protection des Plantes (AMPP), fondée en décembre 1993 à l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II de Rabat, joue un rôle central dans la promotion de la protection phytosanitaire au Maroc. Depuis sa création, elle a su fédérer les chercheurs, enseignants, professionnels et décideurs autour des enjeux liés à la santé des cultures.

À cet égard, il convient de rendre hommage aux femmes et aux hommes qui ont été à l’origine de la création de cette association, et à tous ceux qui, depuis plus de trois décennies, œuvrent avec conviction à son développement. Leur engagement, malgré les moyens limités, les nombreuses difficultés et les défis croissants que connaît le secteur, a permis à l’AMPP de rester une structure vivante, dynamique et au service de l’intérêt général.

Parmi ses réalisations les plus notables figure l’Index Phytosanitaire Marocain (version papier), qui a contribué à une meilleure gestion des traitements phytosanitaires, dans une logique de rationalisation des intrants et de respect de l’environnement.

Par ailleurs, l’AMPP assure la publication de la Revue Marocaine de Protection des Plantes qui valorise les travaux de recherche, les synthèses bibliographiques et les retours d’expérience dans le domaine phytosanitaire. Elle constitue une tribune scientifique ouverte, qui renforce les liens entre le monde académique et le terrain.

L’AMPP organise aussi régulièrement des congrès, journées techniques et tables rondes, permettant d’aborder les grandes thématiques actuelles : la lutte intégrée, la lutte biologique, la gestion des résistances, l’apparition de nouveaux ravageurs, ou encore les enjeux réglementaires.

Aujourd’hui encore, l’AMPP poursuit sa mission avec rigueur et détermination, jouant un rôle de passerelle entre la recherche, la formation et la pratique agricole.

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