Oïdium de la tomate : besoin d’une approche intégrée

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Une gestion efficace de l’oïdium de la tomate repose sur une combinaison de bonnes pratiques culturales, de l’utilisation appropriée de fongicides et de l’intégration de nouvelles innovations. Les producteurs doivent surveiller leurs cultures régulièrement, planifier les traitements fongicides en fonction des conditions climatiques et adopter des méthodes de lutte biologique pour limiter l’impact environnemental. La formation continue et l’adaptation rapide aux nouvelles technologies sont essentielles pour rester compétitif dans un marché en constante évolution.

La gestion phytosanitaire des cultures est une tâche qui devient de plus en plus ardue et qui doit reposer sur la connaissance précise de chaque ennemi. L’objet de cet article est de décrire brièvement les deux types d’oïdium qui affectent les cultures de tomate au Maroc : Leveillula taurica et Oidium neolycopersici ainsi que les méthodes pour s’en prémunir.

L’Oïdium interne : Leveillula taurica 

En fonction des situations de production, il est capable d’affecter aussi bien les cultures de plein champ que sous abris. Il occasionne parfois des dégâts considérables, réduisant fortement la capacité photosynthétique des plantes et donc leur rendement.

Principaux symptômes

Leveillula taurica est responsable de taches d’abord vert pâle apparaissant progressivement sur la face supérieure des feuilles basses des pieds de tomate. De forme arrondie à angulaire lorsque leurs contours sont délimités par les nervures du limbe, elles jaunissent inexorablement au fil du temps. À la face inférieure, on note, en vis-à-vis des taches, la présence d’un discret duvet blanc parsemant les tissus qui sont jaunâtres et présentent quelques micro-altérations brunes. Le champignon peut également sporuler à la surface des folioles lorsque les conditions climatiques humides le permettent.

À terme, les taches finissent par se nécroser entièrement et prennent une teinte brune plus claire en leur centre. Des motifs plus ou moins concentriques sont également visibles. Les macules peuvent confluer et entraîner le jaunissement complet du limbe et la mort de folioles et de feuilles qui, toutefois, ne tombent pas.

Certains fruits n’étant plus protégés sous le couvert végétal subissent des brûlures solaires. Aucun symptôme n’est visible sur les autres organes de la tomate, notamment la tige et les pétioles, ainsi que les fruits.

Conditions favorables

Des températures voisines de 26°C et des hygrométries de 70-80 % sont favorables à son extension, même si des infections peuvent tout de même avoir lieu à des températures comprises entre 10 et 33°C en présence d’hygrométries plus ou moins élevées. La combinaison de journées chaudes et sèches avec des nuits fraîches et humides favorise la maladie. La présence de rosée sur le feuillage joue un rôle aggravant.

Méthodes de protection

Le gène de résistance dominant « Lv » à L. taurica a été introgressé de l’espèce sauvage Lycopersicon chilense dans la tomate cultivée. Cette résistance est maintenant disponible dans plusieurs variétés commerciales.

Sous abris, une désinfection des structures et des parois s’avérera judicieuse afin de détruire les spores présentes. Par la suite, les cultures seront surveillées attentivement afin de détecter les tout premiers symptômes d’oïdium interne. En effet, plus la maladie sera détectée tôt, plus les méthodes de protection mises en place auront une chance d’être efficaces. Il est particulièrement difficile d’enrayer une épidémie de L. taurica en pleine expansion.

Dès que les tout premiers symptômes dus à Leveillula taurica sont détectés, il peut être préconisé d’éliminer rapidement les premières feuilles attaquées en prenant soin de les mettre directement dans un sac plastique afin d’éviter de disséminer des spores. Ces feuilles atteintes seront ensuite évacuées de la culture et détruites.

Il est conseillé également de suivre un certain nombre de mesures d’hygiène tout au long de la culture:

– Réaliser un effeuillage de la base des plantes. Celui-ci permettra d’éliminer les premières feuilles attaquées et favorisera l’aération et l’ensoleillement des parties basses des plantes ;

– Les mauvaises herbes susceptibles d’héberger ce champignon et les débris végétaux seront éliminés assez rapidement des parcelles, à la fois en cours de culture (à la suite des différentes opérations culturales) et après l’arrachage des plantes. Ils seront impérativement détruits.

– Gérer le climat des abris afin de réduire l’hygrométrie et favoriser la circulation d’air. Il conviendra d’éviter les condensations d’eau sur le feuillage.

Il convient aussi de réaliser des traitements à l’aide d’un des fongicides autorisés. Les applications seront soignées afin de bien couvrir les feuilles basses et la face inférieure des limbes. Elles seront renouvelées en alternant des familles chimiques aux modes d’actions différents. Le nombre de fongicides disponibles pour un usage donné évoluant en permanence, il est conseillé de toujours confirmer votre choix en consultant l’index phytosanitaire (ONSSA).

Au niveau international, quelques micro-organismes antagonistes ont été expérimentés et se sont avérés plus ou moins efficaces à l’égard de L. taurica comme : Trichoderma harzianum, Ampelomyces quisqualis… Il en est de même pour un extrait de plante (Reynoutria sachalinensis) et des solutions de phosphate monopotassique ou de bicarbonate de potassium pulvérisées sur les feuilles.

Oïdium externe :Oidium neolycopersici

Bien différent de Leveillula taurica, cet oïdium peut être à l’origine de dégâts considérables, si aucune mesure n’est prise pour le maîtriser. On le retrouve aussi bien sous abris qu’en plein champ.

Symptômes

Oidium neolycopersici provoque des taches sur feuilles assez caractéristiques des oïdiums. Celles-ci sont poudreuses et blanches et couvrent plutôt la face supérieure des folioles de tomate. Ce feutrage blanc est en fait constitué d’un réseau mycélien colonisant superficiellement le limbe.

Localement, au niveau des taches, les tissus touchés deviennent chlorotiques, brunissent localement et finissent par se nécroser. Lors d’attaques sévères, le limbe entier peut être recouvert par le réseau mycélien du champignon et certaines folioles jaunissent et se nécrosent entièrement.
Des taches comparables peuvent être observées sur la tige. Les fruits ne semblent pas affectés.

 Conditions favorables

Ce champignon apprécie particulièrement les ambiances humides et chaudes. Il préfère les hygrométries égales ou inférieures à 80%. Au-dessus, son développement se réduit graduellement. Par conséquent, les hygrométries excessives entraîneraient une réduction de la gravité de la maladie. Par contre, une teneur élevée en azote des tissus foliaires les fragilisera face à cet oïdium.

Méthodes de protection

Plusieurs résistances à O. neolycopersici sont signalées dans la littérature. Elles ont été plus ou moins exploitées par les sélectionneurs. La résistance à l’oïdium est bien souvent associée à une réduction de la croissance mycélienne et de la sporulation du champignon.

Dans les serres, un vide sanitaire doit être effectué, ainsi qu’une désinfection des surfaces avec l’un des nombreux désinfectants destinés à cet usage.

Parmi les mesures prophylactiques permettant d’améliorer la maîtrise de cette mycose, on peut citer:

– l’élimination des débris végétaux des parcelles et de leur environnement, ou leur enfouissement rapide et profond dans le sol ;

– la destruction dans la parcelle et ses abords des mauvaises herbes pouvant servir de plantes relais au champignon parasite.

Un certain nombre de mesures préventives complémentaires pourront être mises en place afin de limiter les risques de voir apparaître l’oïdium. Il est recommandé d’assurer une fumure équilibrée aux plantes et de bannir le voisinage de cultures qui hébergent déjà O. neolycopersici. Signalons que le maintien d’un climat humide permettrait de freiner l’évolution de la maladie. Cette mesure comporte toutefois quelques risques de favoriser d’autres champignons parasites aériens de la tomate.

Lors d’un début d’attaque localisée d’Oidium neolycopersici, il convient de réaliser des traitements fongicides. A rappeler qu’un traitement n’est efficace que s’il est appliqué en temps opportun, à la bonne dose, avec des volumes de bouillie suffisants et un matériel d’application adapté à la tomate. Si vous êtes confronté à une attaque bien en place, il sera souvent plus difficile de contrôler l’évolution de l’épidémie dans la culture. Dans les zones de production et/ou les abris où l’oïdium est plus constant d’une année à l’autre, des traitements préventifs pourront être réalisés avec les produits adaptés.

Des recherches internationales ont montré que l’application foliaire de plusieurs sels, comme le CaCl2, le Ca(No3)et le K2HPO4, auraient permis de limiter le nombre de taches foliaires sur tomate à des niveaux comparables à ceux observés après des traitements avec du soufre.

Valables pour les deux oïdiums !

Les programmes de traitements doivent être définis en fonction du contexte de chaque exploitation afin d’adapter au mieux le positionnement des fongicides. En 2024, 75 produits fongicides avec des DAR allant de 0 à 7 jours sont homologués au Maroc contre l’oïdium de la tomate. En période à risque, le délai entre deux traitements ne devra pas dépasser les 7 à 12 jours, selon les produits utilisés. L’alternance des modes d’action et le respect des doses sont essentiels pour prévenir les risques de résistances.

Des traitements alternatifs à base d’extraits de plantes ou de microorganismes sont disponibles sur le marché marocain et ont montré une efficacité dans la réduction des symptômes d’oïdium. Bien que ces solutions ne remplacent pas totalement les traitements chimiques, elles peuvent être intégrées dans une stratégie globale.

Nouvelles innovations et veille technologique

Les technologies de surveillance modernes, telles que les capteurs connectés et les caméras multispectrales, permettent aux producteurs de détecter les premiers signes d’oïdium avant qu’ils ne soient visibles à l’œil nu. En couplant ces technologies avec des modèles de prévision météorologique, les producteurs peuvent anticiper les périodes à risque élevé et optimiser l’application des traitements fongicides. Cela permet non seulement d’améliorer l’efficacité des interventions, mais aussi de réduire l’utilisation excessive de produits chimiques.

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